Il y a aussi la COP des citoyens : voici les lieux alternatifs et leurs acteurs par Reporterre

 Source Tiffany Blandin (Reporterre)

Les attentats de Paris ont bousculé le programme des mobilisations citoyennes mais plusieurs lieux restent ouverts au grand public pour la durée de la COP 21. Reporterre vous les présente, ainsi que leurs animateurs.

Non, la COP 21 ne sera pas « réduite à la négociation », comme l’avait annoncé Manuel Valls au lendemain des attentats du 13 novembre. Certes, la marche mondiale pour le climat du 29 a été interdite à Paris – la société civile a cependant organisé une chaine humaine réussie. Tout comme les actions prévues pour la clôture de la Conférence. Mais les organisations de la société civile, réunies au sein de la Coalition climat 21, ont annoncé qu’il était plus que jamais indispensable de se mobiliser « pour construire un monde à l’abri des guerres (…) et des ravages de la crise climatique ».

Malgré l’état d’urgence, plusieurs lieux de mobilisation seront donc ouverts aux militants et au grand public. Situés à Paris ou en Seine-Saint-Denis, ces espaces permettront aux visiteurs de mieux comprendre le déroulement des négociations, de découvrir des solutions à la crise climatique, ou même de préparer des actions de désobéissance civile.

Cela fait des mois que des militants et représentants d’ONG préparent ces événements. Quelques jours avant le top départ de la COP, nous sommes allés à leur rencontre. D’abord pour mieux les connaître, et puis aussi pour leur demander ce qu’ils nous ont préparé.

Justine Fautrelle se charge de la logistique du Sommet citoyen pour le climat

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Justine Fautrelle.

L’année dernière, Justine Fautrelle a travaillé sur le Sommet des peuples, le grand rassemblement de la société civile organisé en parallèle de la COP 20 de Lima. Après cette expérience, qui lui a permis de valider son master en gestion de projet de développement, elle est rentrée en France… pour faire la même chose. Elle a en effet rejoint l’équipe chargée d’organiser le Sommet citoyen pour le climat. Il s’agit, comme à Lima, de proposer une COP alternative, qui se veut être un lieu de débats, de libre expression et de recherche de solutions.

Ce grand événement, prévu le week-end des 5 et 6 décembre, à Montreuil, devrait être maintenu dans son intégralité malgré l’état d’urgence. Les prises de paroles et concerts doivent se succéder sur une grande scène installée sur la place Jean-Jaurès, tandis qu’un village mondial des alternatives (voir plus bas) et un marché paysan investiront les rues voisines. « Dans les rues, la programmation est festive et populaire, et plaira même à ceux qui ne sont pas sensibilisés à la question climatique, explique la jeune femme de 24 ans, qui s’est occupée de la logistique de l’événement. Et dans les établissements publics de la ville, des activités plus informatives sont organisées pour ceux qui auraient envie d’aller plus loin. » Le lycée, la salle des fêtes, le cinéma, le théâtre, et la salle de concert de la commune accueilleront ainsi 260 conférences, ateliers, ou projections 100 % gratuits.

- Programme du sommet citoyen pour le climat

Yannick Montaulieu organise le Village mondial des alternatives

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Yannick Montaulieu.

Les militants d’Alternatiba connaissent tous le visage rieur de Yannick Montaulieu. En effet, ce Bayonnais est là depuis les débuts de l’aventure Alternatiba. Il faisait même partie de l’association Bizi !, à l’origine du mouvement. Devenu salarié de l’organisation, il a travaillé sur plusieurs villages de présentation des alternatives. L’été dernier, il a coordonné le tour de France à vélo des militants. Et aujourd’hui, il est aux commandes de l’immense événement que prépare le réseau : un village mondial des alternatives, qui se tiendra les 5 et 6 décembre à Montreuil, dans le cadre du Sommet citoyen sur le climat (voir plus haut).

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L’école Stéphane Hessel, à Montreuil, accueillera quelques stands du village des alternatives.

Dans les rues de la ville de Seine-Saint-Denis, plus de 250 associations, collectifs, coopératives ou collectivités locales organiseront des stands d’information, des ateliers pratiques, des animations et des concerts. Il y aura par exemple une maison témoin. De la cuisine à la chambre, les visiteurs y découvriront comment consommer de manière plus durable. « L’accroche festive a pour but de faire comprendre au public qu’il est possible de faire plein de choses dès aujourd’hui pour agir contre la crise climatique, analyse le militant de 31 ans. Comme pour chaque village Alternatiba, le but est de faire comprendre que modes de consommation et climat sont liés. »

La particularité de cette édition d’Alternatiba ? Les exposants viendront du monde entier. Et des événements y seront organisés tout au long du week-end. Notamment le sommet des 196 chaises. Cette action mettra en scène les sièges réquisitionnés dans des agences bancaires ces dernières semaines par des militants, notamment pour dénoncer les banques soutenant les énergies fossiles.

- Le village mondial des alternatives

Sabrina Caron coordonne la Zone action climat du 104

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Sabrina Caron.

Sabrina Caron n’est pas une militante comme les autres. « Mon but est de rendre la science compréhensible par le plus grand nombre », explique cette Parisienne de 38 ans. Passée par la Cité des sciences et de l’industrie, où elle était chargée de concevoir des outils éducatifs, elle a rejoint en 2003 l’équipe des Petits Débrouillards Île-de-France, une association d’éducation populaire. Du coup, quand la Coalition climat 21 s’est mise à chercher des volontaire pour organiser un événement pendant la COP visant à informer le grand public, elle s’est proposée.

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Le 104.

À l’arrivée, la « Zone action climat » proposera pas moins de 178 activités pédagogiques. Elle sera installée au 104, dans le 19e arrondissement de Paris, entre le 7 et le 11 décembre. Sous la nef de ce gigantesque bâtiment, une assemblée générale viendra terminer la journée. Chaque soir à 18 h, les membres des organisations de la coalition accrédités pour le site du Bourget viendront y raconter leur journée. En plus, des invités extérieurs apporteront leur éclairage sur la situation. Naomi Klein, figure de l’altermondialisme, est notamment attendue.

« Il faut informer les gens sur le mécanisme du climat, sa complexité et ses enjeux, explique Sabrina. C’est important que le grand public s’approprie le combat du climat, car la mobilisation doit être aussi bien locale et quotidienne, que globale et militante. » Ceux qui auront été convaincus par les ateliers pédagogiques n’auront qu’à descendre un étage pour passer aux travaux pratiques. Le sous-sol du 104 est en effet réservé à la préparation des diverses actions qui auront lieu pendant la COP. « Tout le monde est le bienvenu, même ceux qui n’ont jamais milité, précise Sabrina. On n’est jamais trop nombreux ! »

- Zone d’action pour le climat, au « 104 », 5 rue Curial, à Paris

Jay Ralitera mobilise aux quatre coins du monde pour la Conférence des jeunes

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Jay Ralitera.

« Dire que ça va se passer ici ! » s’enthousiasme Jay Ralitera, tandis que nous l’accompagnons repérer le hall 8 du Parc des expositions de Villepinte, quelques jours avant la Conférence des jeunes, ou COY (pour Conference of Youth), qui s’est tenu jeudi 26 novembre jusqu’au samedi 28 (lire notre reportage->http://www.reporterre.net/Des-jeunes-du-monde-entier-s-unissent-pour-le-climat]).

Il faut dire que la jeune femme de 26 ans a passé ses journées et ses week-ends à préparer ce grand rassemblement de jeunes intéressés par les problématiques climatiques. Elle s’est occupée des questions administratives en tant que salariée, et de la mobilisation internationale, pendant son temps libre. Diplômée d’un master en coopération et développement international, elle est engagée dans la vie associative depuis cinq ans, et est passé par Oxfam, des associations étudiantes, et Warn, un mouvement qui coorganise la Conférence des jeunes.

Depuis mars, Jay n’arrête pas. Il faut dire que l’événement a pris une ampleur inédite cette année. Organisées en marge des COP depuis 10 ans, les COY sont habituellement réservées aux « Youngo », les représentants officiels des jeunes auprès de l’ONU, qui ont accès à certains ateliers lors des négociations. Pour la première fois cette année, le rassemblement a été ouvert à tous les jeunes. Au total, ils sont 5.000 à y participer au Parc des expositions. Et 3.600 en plus dans les huit villes du monde qui organisent en parallèle une COY locale.

« C’est important de constituer un réseau de jeunes, parce qu’ils sont capables plus que les autres de créer, de transformer, d’être ouvert à de nouvelles idées », estime Jay. Leurs idées, les jeunes participants les regrouperont dans un manifeste, qui devra être prêt à la fin de la Conférence des jeunes. Leurs représentants officiels pourraient alors l’utiliser comme outil de plaidoyer pendant la COP.

- COY 11

Sami Cheikh Moussa gère Place to B, le QG des journalistes alternatifs

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Sami Cheikh Moussa.

Il y a deux ans, Sami Cheikh Moussa était ingénieur télécom, et enchaînait les missions dans les multinationales. Le voilà aujourd’hui responsable de Place to B, le quartier général des journalistes et blogueur alternatifs de la COP 21.

« En 2013, j’ai tout plaqué pour suivre un Master de développement durable à Sciences-Po. Puis en février, j’ai commencé à constituer la communauté de Place to B sur Internet, en tant que bénévole », raconte Sami. L’association Écolo info, qui organise l’événement, a ensuite embauché l’ancien ingénieur pour gérer le lieu qui accueillera Place to B. Un grand immeuble de six étages, à deux pas de la gare du Nord. À l’intérieur, l’auberge St Christopher’s Inn est entièrement réservée pour les participants. Quant au bar Belushi’s, il se transformera en centre de presse pendant toute la durée de la COP. Plus de 1.000 blogueurs et journalistes de 42 nationalités différentes se croiseront dans l’espace de coworking de 200 mètres carrés, la salle de conférence ou la « Creative Factory », destinée à produire toute sorte de contenus en lien avec la COP, du texte à la vidéo en passant par l’illustration ou la production d’objet. « Ce n’est pas qu’un centre de presse. Nous voulons profiter d’avoir au même endroit toutes ces personnes capables de raconter des histoires pour permettre de trouver des manières de parler différemment du climat », confie le Parisien de 29 ans.

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Place to B, le QG des journalistes alternatifs.

Chaque soir, un débriefing sera organisé pour commenter les décisions officielles de la COP. Puis, à 20 h, le lieu ouvrira ses portes au public. Au programme, concerts, pièces de théâtre, et projections. Et discussions passionnantes avec les membres de Place to B.

- Place to Be, au Belushi’s, 5 rue de Dunkerque, à Paris

Anaïs Roesch prépare la programmation d’Art COP 21, une Conférence des parties créatives

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Anaïs Roesch.

Anaïs Roesch a deux passions, l’écologie et la culture. La jeune femme a fait ses armes en Amérique latine, où elle a notamment accompagné des communautés Mapuche opposées à l’implantation de centrales hydroélectriques sur leur territoire. Puis, elle a été recrutée par l’association Coal, dont le but est de faire émerger une culture de l’écologie.

Sa mission ? Préparer une conférence des parties « créative » dans le décor de café vintage du premier étage de la Gaîté lyrique. Ici, pas question de débattre quota d’émissions ou degrés Celsius. « Le public pourra réfléchir avec des auteurs ou artistes engagés sur la manière de préserver le climat, confie la jeune femme de 26 ans. Il sera par exemple question du rôle de la fiction pour imaginer la société du futur. Ou de la critique de la course à l’innovation technologique. » Depuis 10 mois, cette Alsacienne diplômée de Sciences-Po Grenoble travaille sur la programmation de l’événement, plutôt engagée. « Nous avons une position engagée, mais positive, précise-t-elle. Pour nous, il est possible d’imaginer et d’inventer un autre avenir grâce à la culture. Nous voulons montrer que la question climatique n’est pas seulement entre les mains des politiques. »

Baptisé Art COP 21, l’événement aura lieu tous les après-midi du 1er au 11 décembre. L’entrée est gratuite et il n’y a pas besoin de réserver. Les conférences seront diffusées en direct sur le site Internet de la Gaîté lyrique. Puis les rencontres seront consultables sur la page de l’association Coal. De quoi occuper ceux qui, comme Anaïs, ont envie d’aborder la question du climat autrement.

- Art COP 21, à la Gaîté lyrique, 3 bis rue Papin, à Paris

Julie Prêtre chapeaute le « quartier génial » d’Alternatiba

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Julie Prêtre.

« On va complètement réaménager le lieu. Il y aura des canapés de récup, des tapis, des tissus et même des plantes vertes. » Julie Prêtre nous fait visiter le gymnase ultramoderne qui, pendant la COP 21, accueillera le quartier général d’Alternatiba. Le quartier « génial », comme le mouvement citoyen l’appelle, sera la base arrière du mouvement. 200 militants vont y dormir pendant deux semaines, et plusieurs dizaines d’autres y passer leurs journées. Le gymnase a été ouvert au public lors de l’inauguration samedi 28 novembre, et le sera mercredi 2 décembre après-midi. Julie, qui a été chargée de la coordination du projet, a prévu un espace dortoirs, une cuisine extérieure, des douches, et des toilettes sèches. Sur la mezzanine qui surplombe le gymnase, l’espace est dédié au bricolage de banderoles et de matériel divers pour les actions pendant la COP.

L’ampleur du projet n’a pas fait peur à Julie. À 25 ans, elle est déjà une militante aguerrie. L’an dernier, la jeune femme a notamment étudié le processus de transition des agriculteurs indiens vers un modèle biologique. Puis, toujours en Inde, elle s’est engagée dans un projet de reforestation. En juin dernier, elle enfourchait son vélo pour faire le tour de France avec d’autres militants Alternatiba.

La visite guidée se termine devant un petit bureau. « Ici, ce sera le sas de décompression, informe la jeune femme. Nous allons être tous ensemble dans un climat de négociation internationale avec des enjeux qui vont concerner l’humanité. Ça va être très chargé en information, en émotion et en tension. »

 

durant la COP 21


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